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PAUL KER

En Pénitencechezles Jésuites

CORRESPONDANCE D’UN LYCÉEN

TROISIÈME ÉDITION

PARIS
PIERRE TÉQUI, LIBRAIRE-ÉDITEUR
82, RUE BONAPARTE, 82

1910
Tous droits réservés.

Ceci n’est pas un roman : c’est une histoire vécue.

Je n’ai pas été élevé sur les genoux de la Compagniede Jésus. C’est l’Université qui s’est appliquée la premièreà dégrossir ma jeune intelligence et à la former.Je lui sais gré de ses louables intentions. Mais la véritém’oblige à dire que, si je vaux quelque chose, ce n’estpas à elle que je le dois. Je l’ai, bien qu’involontairement,quittée d’assez bonne heure pour avoir le temps de fairepeau neuve sous une autre influence. Les pages qu’on valire marquent les diverses phases de mon évolution.

Elles sont d’un jeune homme qui dit, au jour le jour,ce qu’il a senti, ce qu’il a vu, et qui le dit sans arrière-pensée.J’aurais pu leur donner un tour moins juvénile,les corriger : je les aurais gâtées. Je les livre au publictelles que je les ai retrouvées, un peu jaunies déjà parl’âge, dans des tiroirs longtemps oubliés. A une époqueoù le mot d’ordre est de courir sus aux Jésuites, ce témoignageprimesautier d’un lycéen devenu leur élève pourra,sinon guérir les aveugles volontaires — miracle difficile — dumoins ouvrir quelques yeux qui cherchent sincèrementla lumière.

Il y a de par le monde des égarés intelligents qui,après avoir reçu chez les Jésuites, quelquefois pourl’amour de Dieu, le pain du corps et celui de l’âme, leleur ont, depuis, vilainement craché au visage. J’enappelle à ceux-là : ils ne sont pas sujets à caution. Qu’ilssoient francs, et je les défie de me taxer d’exagération oude mensonge.

Néanmoins, on est tellement habitué dans certainsmilieux à regarder les Jésuites, qu’on n’a d’ailleursjamais vus de près, comme des êtres à part, ténébreux,insaisissables, essentiellement retors et louches, que je neme flatte pas outre mesure d’être cru sur parole. On diraque je suis un jésuite masqué. Il ne me restera qu’uneressource : c’est de répondre à ces incrédules : « Allez, unebonne fois, y voir vous-mêmes. »

Il s’en trouvera peut-être qui auront assez de courageet de loyauté pour faire cet essai, quand les Jésuitesseront rentrés chez eux — ce qui ne peut tarder bienlongtemps, s’il est vrai, comme on le dit volontiers, qu’étantsortis par les portes, ils ont l’habitude de rentrer par lesfenêtres.

En Pénitence chez les Jésuites

LETTRE 1

A
mon condisciple et ami Louis X., élève deRhétorique au lycée de Z.

1er octobre 187…

Mon cher Louis,

Je t’annonce une nouvelle que tu ne voudras pascroire. J’y crois à peine moi-même… Hélas !

Tu me connais de longue date et tu sais que, si jene suis pas un mauvais cœur, sans me vanter, je n’aijamais été un modèle de travail, de discipline et desérieux. Ah, le sérieux ! Voilà un mot qui m’horripile !On me le répète le matin, on me le répète le soir, onme le fait manger à toutes les sauces : j’en étouffe.Que diable ! Je ne suis pas un bénédictin pour séchersur des bouquins savants, ni un chartreux pour moisiren cellule et me nourrir de silence, d’eau claire et depénitence. Je vais avoir seize ans ; j’ai dans les veinesdu sang qui bout, dans la cervelle quelques idées pasplus sottes que d’autres, dans le cœur… Ma foi

...

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