UN AVENTURIER AU XVIIIe SIÈCLE
(1728-1810)
Les auteurs et les éditeurs déclarent réserver leurs droits dereproduction et de traduction en France et dans tous les paysétrangers, y compris la Suède et la Norvège.
Ce volume a été déposé au ministère de l’intérieur (section de lalibrairie) en juin 1904.
PARIS. TYP. PLON-NOURRIT ET Cie, 8, RUE GARANCIÈRE, — 5673
UN AVENTURIER AU XVIIIe SIÈCLE
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LE
CHEVALIER D’ÉON
(1728-1810)
D’APRÈS DES DOCUMENTS INÉDITS
PAR
Octave HOMBERG et Fernand JOUSSELIN
Avec deux portraits et un fac-similé
PARIS
LIBRAIRIE PLON
PLON-NOURRIT ET Cie, IMPRIMEURS-ÉDITEURS
8, RUE GARANCIÈRE — 6e
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1904
Tous droits réservés
En retraçant l’aventureuse carrière du chevalier d’Éon, notre desseinn’a pas été d’apporter une solution nouvelle aux énigmes qui ontvalu à ce personnage la part la plus large, sinon la meilleure, desa célébrité. En dépit de la curiosité qui s’y attarde, ces énigmesont été résolues déjà et, semble-t-il, de façon définitive. D’Éonétait réellement un homme. L’enchaînement même de ses aventures leconduisit, après une brillante carrière de soldat et de diplomate, àune métamorphose que son apparence gracile et son étonnante ingéniositéfirent accepter—avec une facilité qui reste le véritable mystère detoute cette histoire—par le roi et les ministres, en même temps quepar les compagnons de sa jeunesse. Devenu ainsi, par sa propre volonté,l’héroïne de son siècle, d’Éon se trouva prisonnier d’un rôle qu’iljoua jusqu’à sa mort avec une stupéfiante perfection.
II
Une existence aussi mouvementée, aussi fertile en incidents de toutessortes, devait séduire les écrivains et elle offrait, semblait-il,assez de pittoresque pour qu’on ne fût pas tenté d’y rien ajouter.Cependant le premier historiographe de d’Éon, Gaillardet, bien qu’ilait eu entre les mains les documents originaux les plus importants, semontra dédaigneux d’une vérité historique qui cependant était autrementriche et intéressante que ne pouvait le devenir la fiction la mieuximaginée. De sa collaboration avec l’auteur des Trois Mousquetairesil avait sans doute retenu un profond mépris pour les méthodes timidesdont usent aujourd’hui les historiens. Il publia en 1836 un ouvrage oùil faisait un véritable roman sentimental d’une vie où le sentimentn’avait eu aucune place. Ce ne fut que plusieurs années ensuite, pourconfondre un plagiaire, qu’il se décida à donner de son ouvrage uneédition plus conforme à la vérité historique, mais où subsistent denombreuses erreurs et de plus nombreuses lacunes[1].